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Loi Pinel et fonds de commerce exploité sur le domaine public

Date de publication : 28.06.18

droit commercial . droit immobilier . droit public

Loi Pinel et fonds de commerce exploités sur le domaine public

Patrick Lopasso Thibault Stephan

La reconnaissance de l’exploitation du fonds de commerce sur le domaine public

La loi dite « Pinel » du 18 juin 2014 admet désormais l’exploitation du fonds de commerce sur le domaine public à condition que l’occupant à titre privatif dispose d’une clientèle propre.

Ainsi, le nouvel article L 2124-32-1 du CGPPP dispose désormais que : « Un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l’existence d’une clientèle propre ».

La nécessité d’apporter la preuve de l’existence d’une clientèle propre

Un commerçant pourra exploiter son activité sur le domaine public et se prévaloir de l’existence d’un fonds de commerce à condition d’apporter la preuve du fait qu’il dispose d’une clientèle propre, c’est-à-dire une clientèle autonome, propre au commerçant. Il faudra ainsi parvenir à démontrer qu’il existe une différence réelle entre les usagers du domaine public et la clientèle propre du commerçant. Il n’y aura de clientèle propre du commerçant que si cette dernière n’emprunte le domaine public que pour se rendre chez ce dernier. Il y aura lieu de rechercher le but originel de la clientèle : souhaitait-elle se rendre sur le domaine public et profiter du service public ou souhaitait-elle au contraire se rendre principalement chez le commerçant ? Il conviendra également de rechercher si le commerce peut être considéré comme dissociable du domaine public. Ainsi, le commerce est-il accessible lorsque l’accès au domaine public est temporairement fermé ? Le commerce continuerait-il à exister s’il n’était plus exploiter au sein d’une dépendance du domaine public ?

La question de l’application dans le temps de ces nouvelles dispositions

La question sera de savoir si l’existence de fonds de commerce n’est susceptible d’être reconnue qu’aux « nouveaux entrants ». Il n’existe aucune précision dans la loi sur ce point. Il serait logique cependant que les nouvelles dispositions ne soient applicables que pour l’avenir et ne concernent donc que les nouveaux entrants

Quelle est la marge de manœuvre dont dispose la personne publique qui a délivré le titre d’occupation en ce qui concerne la constitution du fonds de commerce ?

Dans l’hypothèse où le commerçant disposerait d’une clientèle autonome, l’existence d’un tel fonds pourrait-elle être écartée dans le cadre de l’autorisation d’occupation du domaine public? Il convient en principe de répondre par la négative. La personne publique serait ainsi contrainte de reconnaître l’existence d’un tel fonds de commerce. Cependant l’existence d’un tel fonds de commerce sur le domaine public permettra à la collectivité publique de fixer une redevance domaniale plus importante à la charge du commerçant. Cette redevance sera proportionnelle aux avantages retirés par le commerçant quand bien même le fonds de commerce aura une valeur vénale moindre e l’absence de droit au bail.

Dans l’hypothèse d’une cession du fonds de commerce, le titre d’occupation privative peut-il être cédé en même temps par le commerçant ?

Par principe l’autorisation d’occupation du domaine public est strictement personnelle et incessible (CE 10 mai 1989, n° 73146, Munoz, Lebon T. 675). Il est dès lors impossible de céder, gratuitement ou à titre onéreux, un titre d’occupation du domaine public. Il semble ainsi difficile pour l’occupant du domaine public de céder directement, à titre onéreux ou gratuit, son titre d’occupation personnel à un repreneur. Le commerçant pourra cependant « présenter » son éventuel successeur à la personne publique. Il ne pourra pas y avoir de cession de fonds de commerce sans autorisation d’occupation du domaine public.

Au terme de l’autorisation faudra-t-il verser une indemnité d’éviction à l’occupant ?

Pour assurer aux commerçants qui louent des locaux indispensables à leur activité et pour assurer la stabilité leur permettant notamment d’exposer les marchandises qu’ils destinent à leur commerce, la loi leur a conféré, sous certaines conditions, un droit au renouvellement du bail des locaux dans lesquels fonctionne leur entreprise. A cette fin, lorsque le bailleur refuse le renouvellement du bail, il doit verser au locataire sortant une compensation dite « indemnité d’éviction ». En l’espèce, il sera possible de mettre un terme de façon anticipée à l’autorisation d’occupation du domaine public à condition que soit versée à l’occupant une telle indemnité. Il existe dès lors un important risque financier pour les collectivités publiques à la fin de l’occupation.

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